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Après cette déclaration de l’assemblée coloniale, les commissaires civils renouvelèrent leurs exhortations aux confédérés de la Croix-des-Bouquets et de la paroisse du Fond-des-Nègres, dans le Sud ; mais leur lettre, du 8 janvier 1792, ne fut pas exempte de partialité pour les blancs : on y lit ces passages étranges :


« Des motifs estimables en eux-mêmes, mais altérés par des passions, vous ont conduits au comble de l’égarement. Vous désiriez rester Français ! L’êtes-vous depuis que vous combattez des Français pour faire adopter vos pactes, en empêchant l’exécution d’une loi constitutionnelle ? Vous vouliez obéir aux décrets ! vous ne les reconnaissez plus. Vous prétendiez empêcher des malheurs dans les provinces de l’Ouest et du Sud ! Quels malheurs pourraient donc être plus affreux que les incendies et les assassinats, occasionnés par votre confédération ? N’avez-vous pas à vous reprocher les crimes qui se commettent non-seulement par des scélérats de votre parti, mais encore par ceux du parti contraire que provoque votre coalition ? Vous aviez l’intention d’accorder des droits aux hommes de couleur, qui pouvaient et qui devaient participer aux avantages de la révolution ! Ne les exposez-vous pas même à perdre l’état dont ils jouissaient sous l’ancien régime ? La France entière les protégeait et ne voyait en eux que les victimes d’un préjugé ; elle ne les verra plus que comme des ingrats dont l’audace doit armer son bras vengeur. »


Après cette lettre, Augustin Rigaud n’avait-il pas raison de répondre à la municipalité de Torbeck : « Nous savons qu’il y a trois blancs de plus dans la colonie. »