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les auteurs du monument avaient ordonné que la même inscription s’y trouvât tracée en trois sortes de caractères, savoir, en caractères sacrés ou hiéroglyphiques égyptiens, en caractères locaux ou usuels, et en lettres grecques : ainsi, par un bonheur inespéré, les philologues se trouvaient en possession d’un texte grec ayant en regard sa traduction en langue égyptienne, ou, tout au moins, une transcription avec les deux sortes de caractères anciennement en usage sur les bords du Nil.

Cette pierre de Rosette, devenue depuis si célèbre, et dont M. Boussard avait fait hommage à l’Institut du Caire, fut enlevée à ce corps savant à l’époque où l’armée française évacua l’Égypte. On la voit maintenant au musée de Londres, où elle figure, dit Thomas Young, comme un monument de la valeur britannique. Toute valeur à part, le célèbre physicien eût pu ajouter, sans trop de partialité, que cet inappréciable monument bilingue témoignait aussi quelque peu des vues avancées qui avaient présidé à tous les détails de la mémorable expédition d’Égypte, comme aussi du zèle infatigable des savants illustres dont les travaux, exécutés souvent sous le feu de la mitraille, ont tant ajouté à la gloire de leur patrie. L’importance de l’inscription de Rosette les frappa, en effet, si vivement, que, pour ne pas abandonner ce précieux trésor aux chances aventureuses d’un voyage maritime, ils s’attachèrent à l’envi, dès l’origine, à le reproduire, par de simples dessins, par des contre-épreuves obtenues à l’aide des procédés de l’imprimerie en taille-douce, enfin, par des moulages en plâtre ou en soufre. Il faut même ajouter que les antiquaires de tous