Page:Arène - Contes de Paris et de Provence, 1913.djvu/54

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CRANE DE NÈGRE


D’abord ceci n’est pas un conte, mais une histoire, une histoire dont je fus le héros, tout jeune encore, au collège de Canteperdrix.

Notre collège était un ancien couvent, noir, délabré, trop vaste, dont nous n’occupions qu’un petit coin. Le reste, abandonné des hommes et des professeurs, appartenait aux bêtes : aux lézards gris en colonie dans les longues fentes des vieux murs ; aux hirondelles, aux moineaux, aux pigeons qui, en observation sur la tour voisine et connaissant aussi bien que nous la cloche des classes, s’abattaient tous ensemble, d’un vol, quand nous quittions la cour ; aux rats, escadronnant la nuit sur les planchers ; enfin à une mystérieuse famille de hibous qui parfois faisaient hou ! hou ! dans les combles.

Une ménagerie, ce collège de Canteperdrix ! incomplète encore à notre gré, car nous en augmentions le personnel, suivant la saison, par un élevage bien entendu de grenouilles, de hérissons et de salamandres.

Avec ses enfilades de salles voûtées et sonores, ses labyrinthes d’escaliers, son clos herbu, ses deux cloîtres croulants, ainsi faite, la maison nous plaisait. On y vivait, point trop malheureux, dans les plâtras et l’indépendance, toujours en rupture de classe ou