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À SA MARRAINE


20 décembre 1915


Bien, bien, Marraine, ne vous fâchez pas, je ne suis plus ombrageux et vous suis très reconnaissant de l’intérêt que vous voulez bien me témoigner. Je vous enverrai une photo quand j’en aurai une. Quand ? La vie de fantassin ne s’imagine point, surtout dans l’armée où nous sommes et vous savez où puisque les gens de Montpellier y sont aussi. Les cantines des officiers ne nous rejoignent jamais, nos repos étant de plus grandes fatigues et une vie encore plus… que d’être en ligne. En somme, on ne sort jamais des tranchées. Si on nous changeait de région la vie changerait ; il y a des secteurs où l’on est, paraît-il, bien. Il y a civils et civiles assez près des lignes.