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LE POÈTE ASSASSINÉ

pour cause que Mariette n’était qu’une simple paysanne.

On était arrivé à la fin de septembre et l’ayant amené avec lui le lendemain sous les oliviers pleins de fruits, M. Janssen blâma la passion de son disciple qui, tout rouge, écoutait ces reproches. Les premiers vents d’automne se plaignaient et Croniamantal, très triste et très honteux, perdit à jamais l’envie de revoir sa jolie Mariette pour ne garder d’elle que le souvenir.

C’est ainsi que Croniamantal atteignit sa majorité.

Une maladie de cœur qu’on lui découvrit le fit réformer par l’autorité militaire. Bientôt après, son maître mourut subitement, lui laissant par testament le peu qu’il possédait. Et après avoir vendu la maison appelée le Château, Croniamantal vint à Paris pour s’y livrer paisiblement à son goût pour la littérature, car depuis quelque temps déjà, et en cachette, il composait des poèmes qu’il accumulait dans une vieille boîte à cigares.