Page:Apollinaire - Le Poète assassiné, 1916.djvu/128

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
14
LE POÈTE ASSASSINÉ

d’œufs emplies de sorts, d’incantations et autres féeries. Ah ! Ah ! vous avez bien travaillé.

— Sottises ! dit Macarée. Le devoir des femmes est d’avoir des enfants et je sais bien que généralement cela influe très heureusement sur leur santé autant physique que morale.

— De quel côté êtes-vous malade ? demanda Mlle Baba.

— Taisez-vous, paraît ! dit Mme Dehan. Allez plutôt chercher mon flacon d’élixir de Spa et apportez aussi des petits verres.

Mlle Baba apporta l’élixir. On en but.

« Ça va mieux, dit Mme Dehan ; après une telle émotion, j’avais besoin de me remettre. »

Elle se reversa un petit verre d’élixir, le but et en recueillit avec la langue les dernières gouttelettes.

— Figurez-vous, dit-elle ensuite, figurez-vous, madame Macarée… Je le jure sur ce que j’ai de plus sacré au monde, Mlle Baba en peut témoigner comme moi-même, c’est la première fois qu’il arrive pareille chose à une de mes locataires. Et il y en a eu, paraît ! Louise Bernier qu’on appelait la Plie, parce qu’elle était plate ; Marcelle la Carabinière (dont l’insolence était épatante !) ; Josuette,