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fanal marin surmonte sa colonne mutilée. Un aussi bon nageur que lord Byron pourrait traverser le détroit par une belle nuit nacrée. L’antique maîtresse du grec est sur le rivage. Elle enlace le baigneur téméraire en qui elle croit reconnaître son amant. Elle est folle ; et les Dieux l’ont punie d’avoir jadis attenté à ses jours. Ainsi la prêtresse de Vénus est-elle condamnée à courir sur la rive jusqu’à la fin des siècles. Elle a le goût de coquillage quand on la « mange ». C’était un conte de l’ancienne marine au temps où les enseignes connaissaient la fable et citaient le vers « solitaire » de Lemierre :

Le trident de Neptune est le sceptre du monde.

Un canonnier de la batterie à laquelle j’ai appartenu reçut un jour de son frère, marin qui mourut plus tard à Athènes, ces nouvelles qui, à l’époque, m’enchantèrent.

Quand le navire amiral fut en vue du Détroit, une barque, gouvernée par un vieux marinier qui ressemblait à Poséidon,