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énormes se balançaient devant elles et leur donnaient une noble apparence.

« D’autres troupes de femmes se pressaient derrière elles. Comme des rivières houleuses, elles coulaient de toutes les rues et maintenant partout où les regards des émigrantes pouvaient se porter on ne voyait plus que des femmes et presque toutes étaient enceintes. Elles étaient si nombreuses que l’on n’apercevait plus derrière elles ni l’assemblée des mormons, ni celle des gentils. Et, peu à peu, il y eut tellement de ces femmes enceintes qu’il parût n’y avoir sur la place de l’Union que leurs ventres énormes qui remuaient comme les petites vagues d’un lac sur lequel flottaient comme des bouchons de petites têtes aux visages enlaidis par la grossesse.

« Et les émigrantes s’étonnaient que tant de fécondité se manifestât après la stérilité du désert de sel. La religion qu’elles avaient embrassée en Europe peu de mois auparavant, était celle de la fécondité. Puis, se mêlant à la troupe des