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LE JUIF LATIN 43 Dom Calmet. Ce dernier titre m’effraya plus que n’avait pu le faire la déclaration criminelle du juif latin. Je compris qu’il ne se vantait point, et qu’érudit et sanguinaire, l’homme à qui j’avais affaire était un maniaque du meurtre. Je regardai rapidement autour de moi, en l’es- poir de découvrir une arme pour me défendre au cas où Fernisoun ferait le forcené. Je vis sur une étagère, à portée de ma main, un petit revolver à parfumerie qui, détérioré et sans valeur, aurait dû être jeté depuis longtemps. Cet objet me sauva la vie en Toccurrence, car Fernisoun, profitant de ce que je détournais les yeux, avait tiré un couteau passé à sa cein- ture, sous ses vêtements. Je laissai tomber les livres et saisis précipitamment la minuscule et illusoire arme à feu que je braquai sur le juif latin. Il pâlit et trembla de tous ses membres, implorant : — Grâce, vous vous méprenez I Je criai : — Assassin ! va perpétrer ailleurs des crimes que tu crois pardonnables ! Mes principes ne me permettent point de te dénoncer, mais je souhaite que, dès ce soir, tes sauvageries trou- vent un châtiment. Ta lâcheté, j’espère, limite le nombre de tes victimes, et ta loquacité te si- gnalera à la police. Il y a des juges à Paris et,