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en général ; que la violence de l’amour sous un climat constamment brûlant n’est point la même que dans les pays septentrionaux, et que la nature procède à la reproduction par des moyens particuliers et propres à chacun.

« Mirabeau, par une transition heureusement amenée, critique, dans l’Akropodie, une des institutions les plus bizarres et les plus singulières que jamais tête d’homme ait enfantées, je veux dire la circoncision. En passant en revue les motifs qui l’ont pu établir chez les Orientaux, il démontre victorieusement qu’une observance religieuse quelconque, qui n’aurait pas pour base les lois de la morale et de la nature, ne peut servir qu’à tenir dans un avilissement perpétuel le peuple qui la pratiquerait.

« Le Kadesch confirme ces réflexions et prouve avec évidence que l’homme une fois livré à ses désirs immodérés, à ses seules passions, sans frein ni retenue, doit nécessairement s’avilir, au point de méconnaître entièrement les sentiments de la pudeur et de sa propre dignité. Et conduisant comme dans un cloaque d’impureté, il développe dans Béhémiah cette triste vérité que l’homme n’écoutant plus la raison dont il est partagé, poussera bientôt ses folies jusqu’aux plus nombreuses infamies, et ombragera la nature en faisant injure à la beauté sans craindre de se ravaler au-dessous de la brute même.

« Dans un chapitre de l’Anoscopie, Mirabeau nous expose au grand jour l’homme, depuis le berceau du monde, toujours le jouet de ces adroits charlatans qui, abusant sans pitié de sa crédulité, et établissant leur empire sur ses qualités surnaturelles qu’ils affectent mais ne possèdent pas, ont prétendu dévoiler les secrets de l’avenir et connaître ceux que le passé tient cachés dans son sein. Il en conclut que le peuple sera la dupe de ces jongleurs aussi longtemps que ses yeux seront couverts du bandeau de l’ignorance et de la superstition.

« Il couronne enfin son immortel ouvrage par la peinture énergique du tableau hideux des mœurs de toute l’antiquité, et, les mettant en parallèle avec les nôtres, il prouve combien la morale a fait de progrès immenses aujourd’hui, par la raison infiniment simple que la dépravation de l’homme est en raison du peu de développement de ses qualités intellectuelles, et que, plus il sera éclairé sur la dignité de son être et l’excellence de sa nature, moins il s’aban-