Page:Apollinaire - Œuvres poétiques (extraits Poèmes à Lou), 1959.djvu/99

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je l’ai donné je l’ai repris
Il fut là-bas dans les tranchées
Il est ici j’en ris j’en ris
Des belles amours que la mort a fauchées

*

L’espoir flambe ce soir comme un pauvre village
Et qu’importe le Bagne ou bien le Paradis
L’amour qui surviendra me plaira davantage
Et mes yeux sont-ce pas de merveilleux bandits

Puis quand malgré l’amour un soir je serai veille
Je me rappellerai la mer les orangers
Et cette pauvre croix sous laquelle sommeille
Un cœur parmi des cœurs que la gloire a vengé

*

Et tandis que la lune luit
Le cœur chante et rechante lui

Mesdames et Mesdemoiselles
Je suis bien mort Ah quel ennui
Et ma maîtresse que n’est-elle
Morte en m’aimant la nuit

*

Mais écoutez-les donc les mélopées
Ces médailles si bien frappées
Ces cloches d’or sonnant des glas
Tous les muguets tous les lilas

Ce sont les morts qui se relèvent
Ce sont les soldats morts qui rêvent
Aux amours qui s’en sont allés
Immaculés
Et désolés


*