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Comment alors j’ai pu sans mourir les entendre

Ô mots si doux si forts que quand j’y pense il me semble que je les touche

Et que s’ouvre encore la porte de ta bouche

À la sixième porte
Ta gestation de putréfaction ô Guerre avorte
Voici tous les printemps avec leurs fleurs
Voici les cathédrales avec leur encens
Voici tes aisselles avec leur divine odeur
Et tes lettres parfumées que je sens
Pendant des heures
Et que se rouvre encore la porte de ta narine de gauche

À la septième porte
Ô parfums du passé que le courant d’air emporte

Les effluves salins donnaient à tes lèvres le goût de la mer

Odeur marine odeur d’amour sous nos fenêtres mourait la mer

Et l’odeur des orangers t’enveloppait d’amour
Tandis que dans mes bras tu te pelotonnais
Quiète et coite
Et que se rouvre encore la porte de ta narine de droite

À la huitième porte

Deux anges joufflus veillent sur les roses tremblantes qui supportent

Le ciel exquis de ta taille élastique
Et me voici armé d’un fouet fait de rayons de lune
Les amours couronnés de jacinthe arrivent en troupe
Et que se rouvre encore la porte de ta croupe

À la neuvième porte
Il faut que l’amour même en sorte