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du cœur qui sort de ses limbes, et que de dures réalités viennent bientôt éclairer tout à fait. C’est l’histoire d’une âme profonde, trop profonde, peut-être, en un corps de jeune fille, qui, instinctivement, appelle l’amour, parce qu’elle est faite pour lui ; qui ne le reconnaît pas tout d’abord, parmi des cœurs et des lèvres qui se tendent vers ses lèvres et vers son cœur, et qui, finalement, à l’âge où tant de femmes ignorent les premiers balbutiements des suprêmes tendresses, se donne à celui qu’elle aime, librement, consciemment, se transmuant, de sœur d’adoption, puis d’amoureuse farouche en faible et douce consolatrice.

Ce n’est pas sur cette affabulation du thème que se porte surtout mon attention. Je pense qu’en une œuvre comme Avant l’amour, Mme Marcelle Tinayre a dû voir autre chose qu’une aventure pathétique à conter. Aussi bien, n’est-ce point à échafauder un assemblage d’événements plus ou moins vraisemblables qu’elle s’est complue. Elle a sacrifié, ce me semble, à ce qu’elle a cru être une nécessité, — enfermer des théories dans une action presque dramatique, — plutôt que d’exposer sa thèse en manière de critique, selon la mode d’autrefois. Dirai-je que j’aurais préféré cette autre forme ?