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de Milord Céton.

cesse dans ses ports : jamais ils ne sont battus par aucune tempête, on n’y sent que le doux vent des zéphirs qui les agitent nuit & jour. On peut comparer cette île aux rives du Lignon ; comme elle, elle n’est habitée que par des bergers & des bergères, qui, contens d’aimer & d’être aimés, mettent toute leur gloire à s’en donner tous les jours de nouvelles preuves par d’innocentes caresses. Les soupçons, la jalousie, ni mille autres passions qui sont ordinairement le tourment de la plupart des Idaliens, n’empoisonnent jamais leurs plaisirs. Ces citoyens heureux ne connoissent point les remords. Guidés par la nature ils en suivent les loix ; les mêmes desirs les animent, & ce n’est qu’à l’art de se plaire qu’ils bornent tous leurs soins. Une grotte formée par la nature est pour eux un palais ; les fruits de Pomone enrichissent leurs jardins, & la campagne fleurie fournit aux pâturages : c’est-là que de jeunes bergères regardent paître leurs troupeaux, & s’amusent en chantant à en filer la laine.

Zachiel qui seul s’étoit rendu visible, s’avança vers une troupe de bergères qui le reçurent d’un air naïf & spirituel ; & quoiqu’un peu de honte colorât leurs fronts de ce vif incarnat qu’accompagne l’innocence, elles ré-