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de Robinson Crusoé.

de détruire quelques-uns de ces monstres au milieu de leurs divertissemens sanguinaires, & de sauver leurs victimes s’il étoit possible. Je remplirois un plus grand volume que celui ci de toutes les pensées qui me rouloient dans l’esprit sur la manière de tuer une troupe de ces sauvages, ou du moins de leur donner une allarme assez chaude pour les détourner de remettre jamais les pieds dans l’isle ; mais tout n’aboutissoit à rien, toute ma ressource étoit en moi-même ; & que pouvoit faire un seul homme au milieu d’une trentaine de gens armés de javelots, de dards & de flèches dont les coups étoient aussi sûrs que ceux des armes à feu ?

Quelquefois je songeois à creuser une mine sous l’endroit où ils faisoient leur feu, & à y placer cinq ou six livres de poudre à canon, qui, s’allumant dès que leur feu y pénétreroit, feroit sauter en l’air tout ce qui se trouveroit aux environs. Mais j’étois dâcher de perdre tout-d’un-coup tant de poudre de ma provision, qui ne consistoit plus que dans un seul baril ; de plus, je ne pouvois avoir aucune certitude du bon effet de ma mine qui, peut-être, n’aurait fait que leur griller les oreilles, sans leur donner assez de frayeur pour abandonner l’île pour toujours. Je renonçai donc à cette entreprise, & je me proposai plutôt de me mettre en embuscade dans un lieu convenable