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met les deux amis en situation de se prouver leur attachement. Malek vient de conduire Mathilde au monastère du Mont-Carmel, qui n’est pas éloigné du camp des Chrétiens : abîmé de douleur, il reste immobile. « Oublie-tu, lui dit Kaled, que sur la terre où nous sommes chaque instant qui s’écoule peut nous perdre. Fuis, Kaled, ma vie est ici, s’écrie le prince en montrant le monastère, je ne veux pas quitter ma vie, — Si tu demeures, reprend froidement Kaled, je demeure avec toi ; si tu péris, je jure de te suivre » ; et il s’assied tranquillement à côté du prince. Malek le regarde, il voit que son parti est pris ; le sien l’est aussi. « Puisqu’elle est en sûreté, songeons à sauver mon ami ». Il dit, et s’éloigne.

Les amis de madame Cottin trouvoient en elle cette franchise d’attachement qui fait le charme de pareilles liaisons ; elle leur lisoit avec complaisance ses ouvrages et même ses essais, et ne voyoit dans leurs éloges comme dans leurs critiques, qu’une preuve de leur amitié, se trouvoit-elle dans la société, il étoit impossible de la faire parler de ses productions ou de ses travaux ; elle éprouvoit même une sorte de gêne quand on en parloit devant elle : elle seule sembloit ignorer son mérite ; et jamais peut-être tant de modestie ne se trouva réunie à un talent plus vrai.