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ouvrage ; il est probable qu’elle a cherché tous les moyens possibles d’augmenter l’effet d’une scène déjà très— forte par elle-même, et qu’elle s’est livrée sans examen à la fougue de son imagination. Dans le feu d’une première composition on se laisse facilement entraîner au-delà des bornes ; mais la scène dont il s’agit se retrouve dans toutes les éditions. On a donc lieu d’être étonné que l’auteur n’ait pas senti plus tard ce qu’elle avoit de révoltant, et que ses amis, parmi lesquels on comptoit des hommes aussi recommandables par leurs lumières que par la pureté de leur goût, n’aient pas exigé la suppression d’une circonstance d’ailleurs inutile.

Cette critique est la seule à laquelle le joli roman de Claire d’Albe paroisse pouvoir donner lieu ; tout le reste ne mérite que de justes éloges, L’action est bien conduite, les situations se lient entre elles sans gêne et sans effort ; elles sont habilement graduées : mais la partie essentielle, la parte la plus estimable de l’ouvrage, est le tableau des progrès successifs de cette passion qui s’empare de Claire et de Frédéric, qui les subjugue et qui finit par les perdre tous deux. Ce tableau, tracé de main de maître, est d’une effrayante vérité. Madame Cottin a su se préserver d’un écueil que peu d’auteurs auroient évité. Il étoit difficile de sauver M. d’Albe du ridicule ; elle est parvenue à le rendre intéres-