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douleur et ma colère ! La reine Blanchefleur, que j’aimais tant, m’a trahi pour un nain. Si vous en doutez, venez en voir la preuve. » Il les conduit dans sa chambre et leur montre le nain. À cette vue, les barons demeurent tout interdits. Cependant la reine s’éveille, et, se voyant ainsi entourée, ainsi accusée, elle est saisie d’effroi et ne trouve pas un mot pour se défendre. « Seigneurs, dit Charlemagne, que me conseillez-vous ? » C’est Macaire qui prend le premier la parole : « Bon roi, dit-il, à ne vous rien céler, si vous ne la faites brûler, vous serez honni, et vous vous attirerez le blâme de tous, à vous et à nous. » Écoutez ce que fit ensuite le traître.

Il s’adresse au nain et lui dit : « Nain, comment as-tu été assez osé pour entrer céans ? Comment y es-tu venu et par quelle volonté ? — Par ma foi, sire, il faut vous le dire. Je ne serais jamais entré dans cette chambre, et jamais je ne me serais couché dans ce lit si je n’y avais été appelé par la reine, et non pas une fois, mais cinquante. » Il répète ainsi la leçon de Macaire, du maudit renégat que Dieu confonde ! Charlemagne jure que la reine sera brûlée vive. Pour elle, courbée sous la honte, elle n’ose lever la tête, ne tente point de se défendre, et ne fait que se lamenter. P. 27-33.

On la saisit, on l’enferme. Le nain aussi est enfermé séparément. La nouvelle s’est bientôt répandue par tout Paris, où chacun témoigne un grand deuil. On déplore l’infortune de cette reine si avenante, si bonne, qui donnait tant du sien aux pauvres gens, aux chevaliers sans terre, et vêtait leurs femmes. Chacun prie Dieu de la sauver des tour-