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LES AVENTURES DE TIL ULESPIÈGLE

vous retrouverons pas ici. » Là-dessus ils partirent. Ulespiègle s’en alla dans la forêt tendre des pièges aux loups, et il eut la chance d’en prendre un, qu’il tua et qu’il laissa geler. Vers le temps où les marchands devaient revenir à Eisleben, Ulespiègle prit le loup mort dans un sac et s’en alla à l’auberge, où il trouva les trois marchands. Il avait apporté son loup sans être remarqué. Le soir, après souper, l’aubergiste recommença à railler les marchands à propos du loup : qu’ils avaient raconté ce qui leur était arrivé ; mais que, s’il arrivait qu’il fût attaqué par deux loups dans la prairie, il commencerait par se garer de l’un et tuerait l’autre ensuite. Il se vantait qu’il taillerait les deux loups en pièces. Cela dura toute la soirée jusqu’au moment où ils allèrent se coucher. Ulespiègle ne dit rien pendant tout ce temps ; mais quand il fut dans la chambre avec les marchands, il leur dit : « Mes bons amis, tenez-vous tranquilles et veillez. Ce que je veux, vous le voulez aussi. Laissons une chandelle allumée. » Quand l’aubergiste et tout son monde furent couchés, Ulespiègle se glissa hors de la chambre avec son loup mort, qui était gelé raide, le porta près du feu et l’arrangea avec des bâtons de façon à ce qu’il se tînt debout, lui ouvrit la gueule toute grande et fourra dedans deux souliers d’enfant. Puis il s’en retourna dans la chambre étaient les marchands et se mit à crier : « Monsieur l’hôte ! » L’aubergiste entendit, car il n’était pas encore endormi, et répondit : « Que voulez-vous ? Est-ce qu’un loup veut vous mordre ?