Page:Anonyme - Le Bois sec refleuri, 1895.pdf/200

Cette page a été validée par deux contributeurs.

J’ai été trompé par le disciple qui n’a d’autre but que de supplanter son maître.

J’ai planté un arbre fruitier ; il a fleuri d’une fleur unique ; mais si belle ! Un coup de vent a emporté cette fleur vers la mer où elle a été longtemps délicieusement bercée par la vague. La fleur pensait à l’arbre dont elle avait été détachée, et celui-ci, privé de son unique produit, s’est lentement desséché, miné par le chagrin.

Le croissant de la lune semble émerger de la mer. Les poissons sont effrayés, croyant voir l’hameçon doré d’une ligne gigantesque qui veut les prendre.

Chaque mois la lune se voile un instant ; mais bientôt sa lumière réapparaît dans tout son éclat. Moi, au contraire, je n’ai pas revu le jour depuis que j’ai été frappé par la cécité.

Depuis trois ans, mes yeux versent des larmes plus abondantes que la pluie déversée par le ciel. Je pousse des soupirs, plus tristes que le souffle du vent dans les arbres pendant la nuit.

L’aveugle dit en terminant :