Page:Anonyme - Le Bois sec refleuri, 1895.pdf/152

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais une nuit le jeune prince eut un songe. Il vit une bouteille, cassée à sa partie supérieure ; un sang rouge s’en échappait. Réveillé en sursaut, Ki-si effrayé éveilla sa compagne : « Ja-Jo-Mi va me tuer, dit-il dans un sanglot. Je vais te quitter ma chère âme. Ecoute ce que j’ai rêvé ».

A son tour, Tcheng-Y se laisse aller au désespoir. « Sauvons-nous, dit-elle. Nous incendierons votre demeure et nous gagnerons la mer. Ja-Jo-Mi vous croira mort ».

— Non, dit le jeune roi, c’est inutile ; j’ai fait un rêve qui m’annonce un malheur auquel je chercherais en vain à échapper.

— Mais j’y songe, reprit Tcheng-Y. Tu as tort de t’alarmer de ce rêve, il n’a pas le sens que tu lui attribues. Quand on a cassé le col d’une bouteille on la porte religieusement par le fond, comme une statue. C’est ainsi que tes peuples t’apporteront le bonheur, et le sang qui dégoutte de la bouteille figure la pourpre qui te sera dévolue…

Cette explication ne tranquillisa qu’imparfaitement Ki-si. Néanmoins il dit à Tcheng-Y.