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DANS LES MERS ASIATIQUES.

rannique, insolente et cupide, celle qui a infligé tant de maux au monde et au peuple anglais, celle qui déteste la France comme l’ennemie naturelle de son odieux pouvoir ; l’autre, l’Angleterre populaire et laborieuse qui veut l’ordre, la paix et la liberté, celle qui a besoin pour prospérer que tous les peuples prospèrent, celle qui tout bas aime la France et voudrait pouvoir lui donner la main.

Bien souvent on a appelé l’indignation publique sur les trahisons et les perfidies de l’Angleterre ; mais cette accusation si méritée n’est justement applicable qu’à l’aristocratie anglaise, car un peuple ne peut être responsable des actes d’une caste privilégiée, qui possède toute la puissance et qui agit presque toujours dans un sens opposé aux intérêts populaires.

Mais comment tant d’injustices si criantes, tant d’abus si monstrueux ont-ils pu subsister depuis si longues années sans ébranlement et sans secousse ?

C’est que jamais en aucun pays une révolution n’a commencé par les classes les plus pauvres de la société. Lorsqu’elles s’irritent de manquer de travail ou de pain, elles forment à peine une émeute, car les causes de leur irritation sont trop évidemment indépendantes de la forme du gouvernement ; et, lorsqu’elles n’ont point à leur tête des chefs d’une capacité supérieure, elles ne possèdent pas une influence suffisante pour ébranler le gouvernement établi.

Ce n’est pas le plus souvent chez elles que se rencontrent les hommes dont le peuple écoute la parole et dont la destinée est de remuer les nations.