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la saga d’élie

d’autre chose, de maudits païens arrivèrent en bondissant, que Dieu leur puisse donner honte, affront et dommage ! et ils tuèrent, sous Élie, le bon cheval qui valait plus de sept cents livres[1] d’or. Mais il les écarta de son épée et frappa de tous côtés. Galopin saisit une lance et l’aida autant qu’il put, de sorte qu’en peu de temps ils tuèrent quinze[2] païens et les survivants s’enfuirent. Élie et son compagnon cherchèrent devant eux et continuèrent leur chemin au pied des murs de la ville, et ils arrivèrent dans un jardin qui était sous la ville ; jamais nul homme n’en a vu un si beau et si bon. Mais les païens qui s’étaient échappés se hâtèrent vers le palais du roi et racontèrent au roi leur mésaventure. Quand Rosamonde entendit cela, elle se réjouit dans son cœur et dit : « Ô Mahon, mon seigneur suprême, permets-moi de vivre assez longtemps pour que je puisse avoir[3] ce vaillant chevalier en ma garde ; je mettrai en sa puissance ma vie et mon corps tout ensemble. »

(XXXV)

Toute cette nuit, Élie la passa dans le jardin herbu au pied des tours ; il était livré au chagrin et aux soucis, courroucé et affligé, et il tomba souvent en défaillance, déplorant ses malheurs, et il dit[4] : « Ô sire Julien, mon père, j’ai commis une grande folie, quand je te quittai sans ton congé et la rancune au cœur, car maintenant ma vie ne vaut rien[5]. Il est certain aujourd’hui que jamais plus tu ne me verras en bon état et bonne santé. Galopin, » dit-il, « va maintenant ton chemin ; ce jour nous séparera en grande affliction : car je n’ai plus de force[6]. » « Non, sire, » dit le larron, « je ne m’éloignerai pas même pendant ce jour, si vous ne m’accompagnez. Je me ferai

  1. B D marcs.
  2. D dix.
  3. C B D ajoutent : une nuit.
  4. Ici finit le fragment F.
  5. car..... rien manque dans C B D.
  6. car je n’ai plus force est remplacé dans C B D par : prends soin maintenant de ta vie [D aide-toi bien], car ma vie ne vaut plus rien.