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de la jurisprudence, la discussion avait commencé par une lutte d’opinion entre deux orateurs dont les noms, quoique bien connus, étaient tout à fait nouveaux dans l’histoire parlementaire. Plus jaloux des prérogatives du pouvoir que le pouvoir lui-même, l’un (M. Granier de Cassagnac) voulait assimiler le droit de réhabilitation au droit de grâce et le confier au chef de l’état ; l’autre (M. le docteur Véron) combattait fièrement et solennellement cette doctrine, indigné à la seule pensée que l’on accorderait au pouvoir plus qu’il ne demandait. A part cet incident qui enlevait au débat quelque chose de sa gravité, la question avait été sérieusement approfondie.

La loi sur la refonte des monnaies et celle qui concerne la réhabilitation des condamnés sont les seules importantes qui aient été soumises au corps législatif dans cette première session. Beaucoup d’autres cependant ont été livrées à ses délibérations, et quelques-unes méritent d’être signalées : telles sont, dans l’ordre moral et politique, les lois sur le renouvellement intégral des conseils généraux, des conseils d’arrondissement et de ceux des communes, l’interdiction à certains individus de séjourner dans le département de la Seine et dans l’agglomération lyonnaise, la modification de trois articles du code d’instruction criminelle relatifs aux crimes commis en pays étranger. Telles encore, dans l’ordre des intérêts matériels, la loi pour la prorogation du monopole des tabacs, la concession des chemins de fer de Paris à Cherbourg et de Bordeaux à Cette, le premier rattachant Paris au principal port français de l’Océan, le second reliant l’Océan à la Méditerranée ; l’autorisation de la fusion des compagnies des chemins de fer du midi qui doivent conduire de Paris à Toulon par Lyon et Marseille. A ces lois, on doit joindre encore le règlement des comptes des années 1848 et 1849, le vote du contingent annuel de 80,000 hommes, enfin environ cinquante lois d’intérêt local, autorisant soit des surimpositions, soit des emprunts, ou établissant quelque changement dans les délimitations ou la position administrative de certaines communes.

C’est surtout dans la discussion du budget que devait se concentrer toute l’activité du corps législatif ; c’est laque les partis l’attendaient pour juger de sa capacité, de sa hardiesse, de la liberté qui lui serait laissée. Le budget de l’année courante, qui n’avait pu être voté en entier par la dernière assemblée législative, avait été réglé, le 17 mars 1852, par un décret. En effet, le corps législatif, ne devant s’assembler que le 29 mars, ayant d’ailleurs à étudier le budget de 1853, et beaucoup d’autres intérêts, dans une session de trois mois, n’aurait pu s’occuper avec fruit d’un budget dont les divers services étaient déjà engagés. C’est donc sur le budget de 1853 seulement que la nouvelle assemblée était appelée à se prononcer.