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cependant avec l’Océan que par l’embouchure même du Grand-Bassam, et bordé, sur sa rive droite, de villages nombreux et populeux, de terres fertiles et bien cultivées où se fait une grande exploitation d’huile de palme. Toutefois l’exploitation de cette veine fertile a entraîné dès les premiers momens quelques embarras qui peuvent être suivis de luttes sérieuses. Il s’agit d’attirer au comptoir de Grand-Bassam, par les eaux de l’Ébrié, les masses d’huile de palme qui jusqu’à présent trouvaient leur débouché sur la côte, où les recevaient les navires qui viennent troquer en passant le long de ce littoral et en s’arrêtant sur certains points. Les procédés auxquels dans cette lutte commerciale on a eu recours ont amené de graves perturbations, et il faudra sans doute un assez grand déploiement de forces pour amener la reconnaissance incontestée de notre souveraineté dans tout ce riche pays de Grand-Bassam et d’Assinie, qu’arrosent de si beaux cours d’eau, et qui semble promettre à la France un second Sénégal, avec la fertilité de plus. L’action énergique de nos officiers assurera ces résultats.

Cette énergie s’est déployée sur les mêmes parages à l’occasion d’une expédition, dirigée dans l’archipel des Bissagos, coutre deux îles où des navires français naufragés avaient été récemment pillés et rançonnés. Le coup qui a été frappé garantit sans doute pour longtemps, sur cette partie du littoral africain, la sécurité de notre marine marchande.

Les petites possessions françaises de l’Océanie, naguère objet d’un engouement assez mal justifié et théâtre de luttes héroïques auxquelles on n’a pas alors accordé toute l’attention qu’elles méritaient, paraissent aujourd’hui tombées dans un oubli qui nous semble être une autre injustice de l’opinion. Le bien s’y fait à petit bruit et avec économie. Une assemblée de chefs délibère paisiblement à Taïti comme un petit parlement, donnant parfois à de plus grands que lui des leçons de discipline et de théories économiques ; la reine Pomaré jouit en paix de sa modeste liste civile ; l’influence des missionnaires méthodistes y diminue graduellement ; le mouvement de la navigation dans la rade de Papeïti prend un accroissement remarquable sous la triple action des développemens de la pêche baleinière, des migrations excitées par les exploitations aurifères de la Californie et de l’Australie, et des ressources en vivres et en moyens de réparations que l’occupation française assure aux navires au milieu de ces immenses solitudes de l’Océan Pacifique. Ce n’est pas encore là du commerce, C’est-à-dire de l’échange : le pavillon français n’a pas encore acquis dans ces parages l’importance de ceux des États-Unis et de l’Angleterre ; mais c’est dans une île placée à l’abri du drapeau de la France que ces progrès se manifestent, et, quoique naissans, quoique s’accomplissant à l’autre extrémité du monde, ils méritent que le pays ne les laisse point passer inaperçus.

A peu de distance de Taïti, à Noukahiva, l’île principale du groupe des Marquises, s’est fondé silencieusement, dans le courant de 1852, le pénitencier prévu par la loi du 8 juin 1850, relative à la déportation politique. Il a été créé avec, ce qui restait de l’établissement colonial primitivement formé sur ce point de 1842 à 1845, et subséquemment évacué. Cette colonie pénale semble d’ailleurs devoir être délaissée par suite du décret de transportation du 8 décembre 1851, portant désignation spéciale de la Guyane pour l’exécution de cette nouvelle peine.

En terminant cette revue de nos annales coloniales, n’oublions point de mentionner