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de l’année précédente ; sur le baccalauréat es lettres, dont l’examen se trouve simplifié par une réduction des questions, et le baccalauréat ès-sciences, qui comprend désormais une épreuve écrite et des questions de logique, d’histoire, de langue et de géographie ; sur les études et le régime intérieur de l’école normale, dont les élèves, soumis à une discipline plus resserrée, devront recevoir une impulsion plus pratique, laissant plus de place à l’apprentissage du professorat. L’étude des pères de l’église grecque et latine dut aussi faire partie du nouveau programme de l’École normale, ainsi que l’obligation de suivre les cours les plus importans de la faculté des sciences et de celle des lettres, et de les rédiger sous la surveillance immédiate du professeur. Les dispositions délibérées ainsi dans le conseil supérieur furent l’objet de divers arrêtés ministériels du mois d’août 1852, qui les firent passer en loi.

Les questions que le décret du 10 avril avait posées n’étaient point toutes résolues, l’agrégation des lycées, les programmes des licences ès-sciences mathématiques, ès-sciences physiques et ès-sciences naturelles, l’enseignement des facultés des lettres, le régime financier des lycées, n’avaient pu être étudiés dans cette session du conseil ; mais l’on n’avait vu aucun inconvénient à en ajourner l’examen. Le but principal que poursuivait le ministre de l’instruction publique était atteint. L’enseignement de l’état était reformé dans tous ses points essentiels, et les principes des innovations qui devaient venir compléter l’ensemble de ces réformes étaient formulés ; ils avaient déjà reçu la consécration de la loi. Dans ce qui restait à faire, les conséquences seules étaient à tirer. Plus tard, le ministre poursuivit son œuvre dans les régions de l’enseignement supérieur en créant à Paris trois chaires nouvelles : une chaire de grammaire comparée à la Sorbonne, une seconde chaire de droit romain à la faculté de droit, une chaire des origines de la langue française et de son histoire pendant le moyen âge, au Collège de France ; enfin, en avril 1853, nous verrons la question du régime financier de l’Université tranchée dans un sens essentiellement favorable à l’état par l’élévation du prix de la rétribution qui a pour objet de combler le déficit permanent de l’entretien des lycées. En définitive, dès le mois d’octobre 1852, dès la réouverture des classes, l’enseignement secondaire était réorganisé suivant l’esprit du gouvernement nouveau.

Il faut le dire, la réforme ne s’est point accomplie sans rencontrer des objections et des critiques qui, un moment, ont jeté dans l’opinion quelques inquiétudes. En imposant de plus étroites limites à l’histoire et à la philosophie, désormais réduite à la logique, et à la méthode, en imprimant aux lettres et aux sciences une impulsion plus pratique, enfin en séparant les lettres et les sciences par une bifurcation des cours qui devaient commencer dès quatorze ans, n’allait-on point ôter à l’enseignement quelque chose de son élévation ? N’allait-on point diminuer la puissance de ce courant d’idées qui donnait précisément auparavant la vie et le mouvement à toutes les branches de l’Université ? N’était-il point à craindre que des préoccupations utilitaires, des pensées de matérialisme, ne parvinssent à se substituer dans nos écoles aux exagérations de l’idéalisme, et que, pour éviter un danger, on ne fut tombé dans un autre ? Était-ce bien aux mathématiciens de réparer les fautes des philosophes ? Et les sciences, par les habitudes mêmes que leurs méthodes et leurs procédés rigoureux imposent à l’esprit, étaient-elles une bonne préparation pour la vie sociale, où les choses se présentent toujours sous