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ANNALES DU MUSÉE GUIMET


nent pour légitime » 17[1]. Enfin, deux siècles plus tard, un siècle ou deux avant la rédaction finale du Dînkart, paraît un Zoroastrien, Bah Afrîd, réformateur du Magisme, qui, entre autres réformes, interdit à ses adhérents le mariage avec mères, filles, sœurs et nièces 18[2].

Mais en fait, par la nature même des choses, ces unions durent être infiniment rares et nous rencontrons nombre de faits qui prouvent que le mariage usuellement recommandé était bien le Khêtùk-das des Parsis modernes. Le fondateur de la dynastie sassanide, celui qui fait du Zoroastrisme la religion de l’État, Ardashîr (226-241), recommande le Khêtùk-das à ses officiers, mais en termes généraux qui font penser à celui des Parsis modernes plus qu’à tout autre : « Épousez vos proches parentes, afin de resserrer les liens de la famille 19[3]. » Le patriarche arménien, Narsès (ive siècle), interdit en Arménie les mariages entre parents jusqu’au cinquième degré, parce que, dit son historien, les Arméniens persisés épousaient leurs parentes pour préserver la pureté du sang et maintenir l’héritage dans la famille 20[4] : rien n’indique là que l’on dépassât les bornes du Rhêtûk-das moderne des riches Persans et des Parsis. Les règlements sur le mariage, promulgués dans des circonstances analogues par le patriarche des Nestoriens de Perse, Timothée, interdisent au père et au fils d’épouser les deux sœurs « parce que c’est la coutume des païens et des Mages » (quia iste Ethnicorum et Magorum mos est) ; ils interdisent à l’oncle d’épouser la femme de son neveu « ce qui est une coutume des Mages » : mais dans les articles prohibant les mariages incestueux, il ne prononce point le nom des Mages, ce qu’il n’eût point manqué de faire si la pratique eût été courante 21[5].

Par quelles associations d’idées le Magisme se trouva-t-il conduit à accepter et à glorifier l’extrême Khêtùk-das ? — Je crois que la théorie du Khêtûk-das incestueux naquit, par outrance de raisonnement, de la pratique du Khêtùk-das normal.

Le Khêtûk-das entre cousins existait sans doute de temps immémorial ;

  1. 17. Hoffmann, Auszüge aus syrischen Akten persischer Mârtyrer.
  2. 18. Albîrûnî, Chronology, 194 ; Shahrastâni, tr. Haarbrücker, II, 284.
  3. 19. Maçoudi, II, 163.
  4. 20. Hübschmann, Ueber die persische Verwandtenheirath (ZDMG., 1889, 308-312).
  5. 21. Beausobre, Manichéisme, I, 180.