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VOYAGE AU YÛN-NÂN

ces hommes font une foule de contorsions, et se livrent à des gambades comme peu de jongleurs sont capables de les faire.

Au milieu de sa troupe s’avance le commissaire Ly, qui fait ensuite quelques pas au-devant de nous d’un air triomphant. Il parodie le Bourayne en ce moment et cherche à nous faire croire qu’il commande à une armée redoutable.

Les premiers compliments d’usage échangés, je lui dis avoir reçu sa dépêche d’hier, concernant le rapport qu’il a adressé le 21 novembre à la cour de Hué, sur ma mission. L’invitation d’aller attendre à Saigon la réponse du gouvernement annamite est en tout point contraire à ce qui a été convenu en présence du commandant du Bourayne. Il est question maintenant de trois à cinq mois, nous sommes loin des quinze jours qui ont été fixés. 11 m’est de toute impossibilité d’attendre aussi longtemps. J’attendrai que les quinze jours dont on est convenu’soient expirés et pas un jour de plus. Je lui demande ensuite de me fournir les moyens de transports nécessaires pour remonter au Yûn-nân ; je laisserai mes grands bateaux ici, puisqu’il semble craindre des complications à cause d’eux. Je reviendrai avec un délégué du Yûn —nân qui aura pleins pouvoirs pour régler cette affaire avec le gouvernement annamite, si toutefois celui-ci a des doutes sur la valeur des pièces dont je suis porteur. Il me répond qu’il y a des rebelles dans le haut du fleuve et que je ne pourrai pas atteindre le Yûn-nàn. Je réplique que les rebelles auxquels il fait allusion ne me font pas peur. Je lui propose alors d’envoyer des troupes avec moi pour chasser ces rebelles de leur position le long du fleuve. Il paraît très satisfait de cette proposition ; mais, me dit-il, ce n’est pas lui qui commande dans la partie nord-ouest, il faudrait proposer cela au général Fang qui est à Son-tay. Nous décidons d’écrire tous les doux au général Fang pour lui faire cette proposition et le petit mandarin, Huèn, portera nos deux lettres. Je crois avoir quelque chance de réussir par ce moyen ; les Annamites seraient enchantés, en effet, de se débarrasser des rebelles de Lâo-kaï, qu’ils redoutent. Toute la conversation avec Ly roule sur ce sujet ; mais de temps à autre, il revient sur la réponse de la cour de Hué. Il a une peur terrible qu’elle ne parvienne pas dans le délai de quinze jours, alors il lui faudra prendre nn parti. La cour de Hué rendra naturellement responsables tous les mandarins qui m’auront laissé passer ; c’est à eux