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SUR LA MISSION SCIENTIFIQUE DE M. ÉMILE GUIMET

En dehors de ces assemblées, j’eus de nombreuses conférences particulières avec des prêtres dont les connaissances spéciales demandaient à être étudiées à part.

Je n’ai éprouvé quelque difficulté qu’à Ishè, la ville sacrée du Shin-to. Malgré la lettre de recommandation que m’avait remise le gouvernement japonais, malgré l’escorte d’honneur qui m’accompagnait et qui indiquait le cas qu’on faisait de ma mission, les administrateurs religieux de ce pays prétendirent qu’ils étaient complètement indépendants et se refusèrent non seulement à me donner les explications que j’étais venu chercher, mais à me laisser pénétrer jusqu’au grand prêtre des temples.

Après une journée de pourparlers, je pus enfin voir le grand prêtre, qui fut charmant. Il me reçut devant son clergé et tout son personnel d’employés, me fit des excuses de l’accueil qu’on m’avait fait, me donna des livres saints et me fit voir les objets sacrés de ses trésors.

De plus, après m’avoir fourni tous les renseignements que j’avais demandés, il organisa en mon honneur une danse religieuse, telle qu’on l’exécute les jours de grande fêtes ou en présence de S. M. le mikado.

À part cet incident qui s’est fort heureusement terminé, j’ai rencontré partout l’accueil le plus sympathique.

J’avais attaché à la mission un habile dessinateur, M. Félix Regamey, le correspondant bien connu des journaux illustrés de Londres, de New York et de Paris ; il a reproduit fidèlement soit les monuments religieux, soit les scènes intéressantes du voyage, et j’aurai sans doute l’honneur, un jour de mettre sous vos yeux la série fort curieuse de ses dessins et aquarelles.

En dehors de son précieux concours, mua travail a été facilité par d’excellents interprètes parlant bien le français et connaissant le japonais littéraire et le chinois. Ces jeunes gens sortent de l’école française de M. Dury ; ils me rejoindront en France où ils m’aideront à coordonner mes notes et mes livres, et contribueront à former l’école japonaise et chinoise que je compte fonder à Lyon, et dont j’ai déjà eu l’honneur de vous entretenir.

Je reviens donc du Japon avec les documents les plus complets et les plus importants sur les religions de ce pays. J’ai rapporté avec moi plus de trois cents peintures japonaises religieuses, six cents statues divines et une col-