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DOCUMENTS ORIGINAUX.

sous l’impression qu’il devait s’y trouver quelque chose de tangible. Bien souvent, je vois cette étoile brillante au-dessus de ma fille unique. À cause de cette étoile hallucinatoire, je suis devenue presque superstitieuse, puisqu’elle m’apparaît toujours avant quelque succès, quelque joie. Jamais je ne suis parvenue à évoquer l’apparition de cette étoile, malgré tous les efforts de ma volonté.

Je dois encore remarquer que les phénomènes hypnagogiques et hallucinatoires deviennent plus rares chez moi sous l’influence des émotions pénibles, des inquiétudes, et aussi sous l’influence des distractions et des fatigues de la vie des grandes villes — pour les bien voir et les bien observer, il me faut une vie tranquille, monotone même, une vie de travail scientifique ou littéraire.

Quant à l’influence des différentes saisons j’ai toujours observé que l’automne est le temps le plus favorable pour l’apparition des images hypnagogiques et hallucinatoires, puis viennent l’hiver et le commencement du printemps, tandis que les mois mai, juin, juillet et août sont ordinairement tout à fait défavorables aux différents phénomènes de la vie subjective de notre système neuro-cérébral. Puis, comme l’a déjà remarqué Johannes Müller, l’âge a une grande influence sur la vie subjective des appareils nerveux, c’est-à-dire que celle-ci devient de plus en plus faible à mesure que la vieillesse arrive.

Après ces remarques préliminaires faites, je passe à présent au récit désiré ; mais je dois avouer que, pendant toute ma vie, dans des cas sans nombre, j’avais eu l’occasion de me convaincre que les différents pressentiments que j’éprouvais se montraient toujours justes ; cependant je n’agissais jamais d’après mon pressentiment bien que toujours j’eusse à me repentir de n’avoir pas obéi à ce pressentiment.

L’année dernière, après avoir pris part au Congrès médical international, à Rome, j’ai passé six mois à voyager en Europe. En revenant à Saint-Pétersbourg, au commencement du mois de septembre, j’ai appris les nouvelles inquiétantes de la maladie de l’empereur Alexandre III. Comme j’avais eu l’extrême honneur de connaître personnellement le feu