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un, un un, un un un, un un un un,…

C’est exactement de cette manière que les Romains écrivaient les quatre premiers nombres naturels ; et c’est également à ce système que l’on doit rapporter et les failles dont se servent les gens du peuple qui font compte chez les boulangers, la manière de marquer les points au billard, les jetons qu’on donne et qu’on reçoit dans la plupart des jeux de cartes et beaucoup d’autres inventions analogues. Le signe peut varier d’un cas à l’autre, mais l’idée fondamentale demeure constamment la même ; c’est toujours, dans tous les cas, un même signe répété autant de fois que l’on veut exprimer d’unités. À la vérité, ceux qui font usage de cette manière de rappeler aux yeux l’idée des nombres, les énoncent de la même manière que nous ; mais les horloges, lorsqu’elles sonnent les heures, se conforment exactement à l’esprit de ce système. Elles ne disent pas, comme nous, un, deux, trois, quatre, …, mais elles répètent le son par lequel elles avertissent qu’il est une heure autant de fois qu’elles en veulent indiquer.

Outre que l’adoption d’un tel système serait peu fatigante pour la mémoire qui n’aurait à se charger que de la forme d’un caractère d’écriture et d’un son unique, il offrirait le précieux avantage d’une liaison étroite entre le signe et l’idée signifiée ; car, comme nous l’avons déjà fait observer, il est presque impossible de voir plusieurs signes ou objets pareils, il est presque impossible que l’oreille soit frappée plusieurs fois consécutivement d’un même son, sans qu’aussitôt, et presque involontairement, l’idée d’un certain nombre d’unités ne soit réveillée dans l’esprit. C’est donc là une langue très-naturelle ; aussi est-elle universellement comprise par tout le monde, sans qu’elle ait aucunement besoin d’être enseignée.