Page:Annales de mathématiques pures et appliquées, 1830-1831, Tome 21.djvu/324

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fois plus élevés au-dessus du sol. Pareillement ceux que nous ne pouvions atteindre qu’en élevant ou en abaissant le bras, n’exigeraient pas de notre part, pour être saisis, un mouvement différent, puisque notre bras serait devenu exactement deux fois plus long. Et quant à ceux qui étaient d’abord hors de notre portée, nous n’aurions pas alors un plus grand nombre de pas à faire pour arriver à eux, puisqu’en même temps qu’ils seraient deux fois plus éloignés de nous, l’étendue de nos pas se trouverait doublée.

Des considérations tout à fait semblables prouvent que si, à l’inverse, tout l’Univers et les intervalles entre les corps dont il se compose devenaient tout à coup deux fois plus petits, nous serions également tout à fait dépourvus de moyens de la reconnaître.

C’est uniquement pour ne pas choquer d’une manière trop brusque les préjugés que le lecteur pourrait s’être fait sur ce sujet, que nous avons cru devoir nous arrêter d’abord à une supposition aussi modeste. Il est évident, en effet, que ce que nous venons de dire du cas où l’Univers deviendrait tout à coup deux fois plus grand ou deux fois plus petit, nous pouvons le dire, à tout aussi bon droit, du cas où ce même Univers deviendrait subitement dix, cent, mille, un million, mille millions de fois plus grand ou plus petit ; et pour peu qu’on y songe bien, on ne tardera guère à demeurer convaincu qu’un changement si énorme en apparence, demeurerait tout à fait inaperçu. Si donc quelqu’un affirmait que d’instant en instant l’Univers entier devient alternativement mille millions de fois plus grand et mille millions de fois plus petit, il nous serait tout aussi impossible de lui prouver qu’il se trompe, qu’il le serait à lui de nous prouver qu’il dit vrai ; de sorte que, quelque peu probable que la chose puisse paraître, il y aurait de la témérité à affirmer qu’il n’en est pas ainsi.

Quelle réponse raisonnable peut-on donc faire à cette question : Quelle est la grandeur des hommes, des animaux, des arbres, de la terre, des astres ? Aucune absolument ; car, sans que nous