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sons forts et des sons faibles, on en rencontre aussi quelquefois dont l’œil ne distingue, dans les couleurs, que du clair et du foncé, et qui ne conçoivent pas, par exemple, qu’il soit plus facile d’apercevoir des cerises sur un cerisier que des olives sur un olivier. Il est manifeste que, pour des personnes organisées de la sorte, tout ce que nous écrivons ici doit être complètement inintelligible[1].

Ces préliminaires ainsi établis, nous allons poser deux principes généraux que chacun pourra aisément vérifier par sa propre expérience, et dont le second n’est même, à proprement parler, qu’une conséquence forcée du premier. On verra ensuite tout ce qui concerne les couleurs accidentelles s’en déduire sans effort.

Le premier de ces deux principes consiste en ce que l’action continue, ou même fréquemment répétée, de quelque objet extérieur sur l’un quelconque de nos organes, finit par le blaser sur l’impression qu’il en reçoit, au point d’y devenir presque entièrement insensible.

Les preuves d’expérience se présentent ici en foule, et nous n’ayons, en quelque sorte, que l’embarras du choix.

La première fois qu’on porte immédiatement un vêtement de laine sur la peau, on en est d’ordinaire singulièrement incommodé, on éprouve des démangeaisons fort gênantes ; mais avec un peu de persistance on en vient bientôt à n’y plus faire aucune attention.

Le palais des personnes qui font habituellement usage d’alimens peu sapides est vivement affecté par des mets dont l’assaisonnement

  1. J’ai souvent pensé que Descartes, qui prétendait expliquer la diversité des couleurs par une plus ou moins grande intensité de lumière, devait être affecté de quelque vice organique du genre de celui que je viens de mentionner.