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Il ne me paraît donc pas possible de fonder solidement cette théorie sur les principes de Bertrand de Genève ; et j’observerai, en général, sur les démonstrations qui emploient la considé-

    déduite. Or, comme, parmi ces dernières, nous n’en voyons aucune, sans en excepter celle d’Euclide, qui le cède en évidence avec la proposition dont il s’agit, nous inclinerions fort à lui donner la préférence sur toutes les autres. Dans tous les cas, il faudrait, en déplaçant la difficulté, éviter surtout de la rendre plus grave.

    C’est en particulier, ce qui arriverait si, comme quelques géomètres l’ont proposé, dans ces derniers temps, à l’exemple de Carnot, on admettait, sans démonstration, le principe de similitude. On pourrait, en effet, opposer aux partisans de cette doctrine le dilemme que voici : où vous n’avez d’autre but que de faire disparaître ou du moins de déguiser la difficulté que présente la théorie des parallèles, et alors il faut que vous admettiez que cette proposition : Une figure étant donnée, on peut toujours en concevoir une autre, de telle grandeur on voudra, qui lui soit parfaitement semblable, est plus simple et plus évidente que celle-ci : Par un même point donné, on ne peut faire passer qu’une seule parallèle à une même droite donnée ; et vous trouverez probablement peu de personnes de votre avis sur ce point ; ou bien vous trouvez le principe de similitude d’une telle évidence, que vous n’hésiteriez pas à l’admettre, comme axiome, lors même qu’indépendamment de ce principe, la théorie des parallèles se trouverait mise tout-à-fait hors d’atteinte, et alors vous serez désavoués par beaucoup de géomètres qui pensent que, bien loin de multiplier les axiomes, on doit, au contraire, ne rien négliger pour les réduire au moindre nombre possible, afin de faire, autant qu’il se pourra, de la géométrie une science de définitions et de déductions logiques, et qui, dans cette vue, s’appliquent même à démontrer soigneusement une multitude de propositions qui pourraient, à bon droit, passer pour beaucoup plus évidentes que le principe dont il s’agit.

    Remarquons bien en outre que cette proposition : Une figure étant donnée, on peut toujours en concevoir une autre, de telle grandeur on voudra, qui lui soit parfaitement semblable, pourra être indistinctement vraie ou fausse, suivant l’acception, très-libre d’ailleurs, qu’on voudra attacher au mot semblable, et qu’aussi long-temps que cette acception n’aura pas été nettement fixée, la proposition, si tant est qu’elle puisse alors signifier quelque chose, sera du moins fort loin d’avoir ce sens précis qui seul pourrait lui mériter de trouver place dans des élémens de la science exacte par excellence.