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DES SCIENCES.

Il est pourtant permis de douter que cette langue eût été reçue par les savans, sans l’attention qu’ont eu les inventeurs d’en faire dériver les mots d’autres mots pris dans les langues anciennes ; en quoi, au surplus, ils se seraient montrés beaucoup moins raisonnables que la multitude qui a accepté ces mêmes mots sans s’informer aucunement de leur origine, et qui même a pu croire qu’ils avaient été formés de toutes pièces.

VIII. Lorsqu’on trouve ainsi un avantage évident à former des mots ou des signes composés, on peut alors en tolérer la longueur et la complication ; mais, dans le cas contraire, on ne devrait jamais souffrir dans les signes de nos idées que la complication strictement nécessaire pour en varier les formes autant que leur nombre peut l’exiger. C’est même là un des principaux avantages de la langue algébrique. Sa concision permet de saisir d’une seule vue toutes les diverses parties d’une formule, et d’y apercevoir facilement des rapports qu’une langue moins briève ne laisserait que difficilement découvrir. On peut en dire autant de la langue

    forment des sons très-différens. De même, dans l’écriture, les mots un et nu se confondent presque à la vue, quoiqu’ils aient un sens très-différens, tandis que les mots un et le, qu’on ne saurait prendre l’un pour l’autre, n’expriment que deux nuances d’une même idée.

    On peut observer, en faveur de l’une des deux opinions, que si les signes de deux idées peu différentes sont eux-mêmes presque semblables, on y trouvera cet avantage que, si, dans un discours ou dans une écriture rapide, on substitue l’un à l’autre, il en résultera la moindre altération possible dans le sens de la phrase ; mais nous sentons fort bien qu’on peut objecter que par là même que cette altération sera peu considérable, il en deviendra d’autant plus difficile de l’apercevoir ; tandis qu’il n’en serait pas ainsi, si une légère altération dans le signe lui faisait tout-à-coup représenter une idée si totalement différente de la première, que la substitution de celle-ci à l’autre dût rendre le discours tout-à-fait insignifiant.

    J. D. G.