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COULEURS

On donne communément comme caractère distinctif des idées simples qu’on ne peut les acquérir, lorsque ce sont des idées sensibles, que par la sensation même ; et qu’elles sont absolument incommunicables par le secours des mots ; tandis qu’au contraire l’imagination, en combinant à son gré des idées simples, peut former une multitude d’idées complexes, n’ayant aucun modèle extérieur, lesquelles pourront être communiquées par le discours à tous ceux à qui les idées simples dont elles seront l’assemblage seront familières. Or, s’il en est ainsi, comme on ne saurait guère en douter, il faut dès-lors convenir que les idées du rouge, du jaune et du bleu ont tous les caractères des idées simples, tandis qu’au contraire celles de l’oranger, du vert et du violet semblent incontestablement être complexes ; d’où il paraît naturel d’inférer que les couleurs de la première série sont des couleurs simples, tandis qu’au contraire celles de la seconde sont des couleurs binaires.

Supposons, en effet, qu’il n’y ait, dans la nature, que du rouge et du jaune et toutes les nuances qui peuvent résulter du mélange de ces deux couleurs, dans diverses proportions ; on ne conçoit pas mieux comment, dans cet état de choses, nous pourrions nous former l’idée du bleu, que l’on ne conçoit comment

    et deux de jaune, et ainsi de suite, jusqu’à la septième qui, étant couverte de parties égales de rouge et de jaune, offrirait l’oranger pur. La huitième offrirait un mélange de 5 parties de rouge et, de jaune, et l’on arriverait ainsi, par des nuances presque insensibles, à la treizième, qui offrirait le jaune pur. On passerait, par de semblables degrés, du jaune au vert, du vert au bleu, du bleu au violet, et enfin du violet au rouge.

    On pourrait d’ailleurs, en supposant originairement de cylindre blanc, affaiblir graduellement les teintes des différentes bandes depuis son milieu jusqu’à l’une de ses extrémités, où se trouverait ainsi une zone entièrement blanche et, à partir du même milieu, appliquer sur l’autre moitié de ces bandes du noir de plus en plus intense, de telle sorte qu’à l’autre extrémité, le noir ne laissât plus percer la couleur sur laquelle on l’aurait appliqué. Le cylindre se trouverait ainsi terminé, à cette extrémité, par une zone entièrement noire.