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JUGEMENT

Lorsque les opinions sont également partagées dans le jury, il peut souvent arriver que la cour, qu’on ne consulte pas alors, soit unanimement d’avis que l’accusé est coupable ; cet accusé a donc alors 11 voix contre lui, et 6 seulement qui lui sont favorables, et cependant il est absout de droit ; d’où l’on pourrait inférer que la loi ne pense pas que même une majorité de 11 voix contre 6 soit toujours suffisante pour condamner.

Et pourtant elle condamne, dans d’autres cas, à une simple majorité de 9 voix contre 8.

Et qu’on ne dise pas que le cas du recours aux juges est une sorte de cas d’exception, une sorte de hors-d’œuvre qui sort tout-à-fait de la règle commune ; car, outre que lorsqu’il est question des plus chers intérêts des citoyens, les cas d’exception ne doivent pas être moins soigneusement combinés que le principe général auquel ils dérogent ; il n’est malheureusement que trop connu aujourd’hui que, par l’effet d’une faiblesse tout au moins très-blâmable, ce que le législateur avait pu en effet n’envisager que comme une ressource pour des cas extraordinaires est devenu d’une application presque journalière ; attendu que les jurés, en dépit de leur conviction, arrangent communément leur déclaration de manière à rendre obligatoire l’intervention de la cour.

Nous pressentons une objection ; et nous nous hâtons d’y répondre. On dira peut-être qu’un accusé déclaré coupable par un jury ne peut que trouver avantageuse pour lui la ressource du recours aux juges, dont la décision qui, dans aucun cas, ne saurait aggraver sa situation, peut quelquefois la rendre meilleure.

Ce raisonnement pourrait tout au plus être admis, si, le recours à la décision des jugés étant purement facultatif de la part de l’accusé, la loi avait statué que, faute par lui d’en faire usage, la déclaration du jury, bien que rendue à une faible majorité, réglera son sort ; mais, encore un coup, la loi, qui reconnaît une majorité de 7 voix contre 5 trop faible pour condamner, doit, à plus forte raison, lui refuser sa confiance, lorsque la déclaration