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SUR LE CALCUL DIFFÉRENTIEL.

je porte encore le défi d’expliquer ce fait majeur, sans avoir recours aux séries. Cela étant, puisqu’il faut absolument, et avant tout, être maître du développement en séries, pourquoi ne passerait-on pas de là immédiatement au calcul différentiel, par la porte de plain-pied qui est ouverte ? et pourquoi reviendrait-on, par un circuit ténébreux, celui des considérations infinitésimales, aux principes de ce calcul ? Qu’on se forme, si l’on veut, et ce qui est possible, d’après la vraie théorie, des méthodes abrégées qui permettent de biffer ou d’omettre, à l’avance, des termes de développement, qui disparaîtront à la fin de longs calculs ; je ne m’y oppose pas ; les géomètres exercés le font tous ; et quand une fois on est en possession de ces méthodes, on peut, dans la géométrie et dans la mécanique, parler un langage qui se rapproche de celui des infinitaires, sans néanmoins attacher aux mêmes termes les mêmes idées ; mais il serait absolument impraticable de commencer par là.

Il y a plus. Si l’on consulte l’histoire du calcul différentiel, combien y verra-t-on de questions puériles ou ridicules, de contestations plus qu’animées, d’erreurs même, prendre leur source dans l’obscurité répandue par les infiniment petits, et dans la difficulté de leur maniement. Je ne puis m’engager dans cette discussion ; mais qui est-ce qui ne se rappelle pas les incompréhensibilités de Sturmius ; les Subtilités de Guido Grandi ; les Ponts jetés entre le fini et l’infini de Fontenelle ; la méprise de Sauveur, dans le problème de la Brachystochrone ; celle de Jean Bernouilli lui-même, dans sa première solution du problème des Isopérimètres ; celle de Charles sur les solutions particulières des équations différentielles ; les discussions relatives à l’expression analitique de la force accélératrice du mouvement varié : discussions qui dégénérèrent en dispute entre Parent et Saurin, relativement aux théorèmes d’Huygens sur la force centrifuge, et qui enfantèrent cette ridicule distinction de la force considérée dans la courbe polygone et dans la courbe rigoureuse ; discussions enfin qui ne sont pas encore terminées, à en