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NÉGATIVES.

Écartons-nous, toutefois, le moins que nous le pourrons, des notions communes, et voyons quels sont les cas où ce qu’on appelle vulgairement nombres abstraits, se présente à nous. J’en remarque deux principaux : le premier a lieu lorsque nous cherchons à assigner le rapport entre deux quantités de même nature, et on peut dire, dans ce sens, que le nombre abstrait exprime combien de fois une quantité donnée doit être répétée pour former, une autre quantité, aussi donnée, de même nature qu’elle.

Le second cas a lieu lorsqu’il s’agit d’assigner les rangs entre une suite de grandeurs dérivées les unes des autres, suivant une loi quelconque : on peut donc dire, sous ce nouveau point de vue, que le nombre abstrait exprime le rang qu’occupe un objet parmi plusieurs autres.

Ces notions ainsi admises, et elles le sont universellement ; si l’on nous demande, par exemple, quel est le rapport entre 12 francs de biens et 4 francs de biens, nous répondrons, sans hésiter, que c’est le nombre abstrait 3, et nous ferons exactement la même réponse, si l’on nous demande quel est le rapport entre 12 francs de dettes et 4 francs de dettes ; puisqu’il faut répéter 3 fois, soit 4 francs de biens pour faire 12 francs de biens, soit 4 francs de dettes pour faire 12 francs de dettes.

Que si l’on nous demande ensuite quel est le rapport, soit entre 12 francs de biens et 4 francs de dettes, soit entre 12 francs de dettes et 4 francs de biens, nous pourrons nous trouver dabord embarrassés, et même la question pourra, d’une première vue, nous sembler absurde ; attendu que des biens répétés font toujours des biens, et que des dettes répétées font toujours des dettes : cependant, en y réfléchissant mieux, nous ne tarderons pas à apercevoir qu’il existe un moyen de faire, soit 12 francs de biens avec 4 francs de dettes, soit 12 francs de dettes avec 4 francs de biens ; et que ce moyen consiste à répéter d’abord 3 fois les 4 francs, soit de biens soit de dettes, et à changer ensuite le mode d’existence du résultat obtenu.