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DE FACTEURS.


pris 3 fois, et 3 pris 2 fois, font également 6 ; que 3 pris 4 fois, et 4 pris 3 fois, font également 12, et ainsi du reste ; mais il n’est point du tout évident que, par exemple, il revienne au même d’ajouter 235 fois à lui-même le nombre 173, ou d’ajouter 172 fois à lui-même le nombre 236 ; et ces deux opérations, soit qu’on y procède par addition ou qu’on y fasse usage de la multiplication, diffèrent trop dans leur marche pour qu’on puisse prévoir à l’avance, si déjà l’on n’en était averti, qu’elles doivent conduire au même résultat. À plus forte raison la chose cesse-t-elle d’être claire d’elle-même, si l’on admet de plus grands facteurs et en plus grand nombre, et elle le devient encore moins, si l’on prend des facteurs fractionnaires ou irrationnels. Cette propriété est même tellement inhérente à la qualité abstraite des nombres, qu’elle cesse d’être vraie du moment qu’on les en dépouille. Ainsi, par exemple, tandis que la multiplication d’une ligne par un nombre abstrait est une opération parfaitement intelligible et facilement exécutable avec la règle et le compas, celle d’un nombre abstrait par une ligne n’est, au contraire, qu’un être de raison.

On a donc très-bien fait de chercher à démontrer, dans les livres élémentaires, que le produit de plusieurs facteurs se compose de la même manière de chacun de ces facteurs, et en est conséquemment une fonction symétrique ; mais, des démonstrations qu’on a données jusqu’ici de ce principe, la plupart manquent de rigueur, de généralité ou de simplicité, et les autres sont de véritables paralogismes. C’est ce qui me détermine à présenter ici celle que, depuis plusieurs années, j’ai adoptée dans mes cours, et qui me paraît ne rien laisser à désirer.

Il est une vérité d’un ordre plus élevé, qui a beaucoup d’analogie avec celle-là, et qui peut être démontrée par le même tour de raisonnement ; je veux parler de l’identité entre les résultats auxquels on parvient, dans la différentiation des fonctions de plusieurs variables, en intervertissant d’une manière quelconque l’ordre des différentiations successives : identité qui, pendant long-temps, a aussi été admise