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Le joli clocher de Bangor s’élève là-bas au milieu des maisons qui se pressent autour de lui comme pour implorer sa protection. Ses cloches sonnent l’Angelus, dont le chant s’égrène dans l’air pur du soir aussi doux qu’une harpe éolienne.

Le grand Phare se dessine, majestueux, c’est l’espoir. Et, réconfortés, nous pressons notre pas parmi les bruyères roses de la lande pour gagner la maison des dames Laleouse, où nous attend un sympathique accueil.

Kervilaouen est un gentil village au grand puits biblique que les rayons du Phare éclairent chaque nuit. Accoudés à notre fenêtre, nous les suivons bientôt de nos yeux étonnés, ces rayons, qui semblent prendre toutes les lumières des maisons pour les entraîner dans leur course sans trève à travers l’espace. Car, dans cette île bénie, point n’est besoin de fermer les volets ; je doute même que les portes soient closes au verrou.

Et je me murmure ces paroles de l’Évangéline de Longfellow, le grand poète américain : « Ils n’avaient ni verrous à leurs portes, ni volets à leurs fenêtres, ces fermiers acadiens, leurs maisons étaient ouvertes comme leurs cœurs… »

Qui, ces Bellilois sont bien les descendants de ces Acadiens aux âmes loyales, aux cœurs charitables et patriotes, qui préférèrent l’exil à la trahison.

Après un dîner substantiel, nous reposons délicieusement dans une chambre fraîchement blanchie à la chaux, dont les draps fleurent bon la lavande.


Troisième Journée

Du Talus à l’Apothicairerie


Nous nous levons dès l’aurore, afin de profiter de la