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désigne sous les noms de maquis, garigues, ou autres. C’est une des associations caractéristiques que distingue la science botanique.

Partout donc nous rencontrons des expressions collectives, les unes populaires, les autres scientifiques, correspondant à ces faits d’observation. Elles suffiraient à nous avertir qu’un lien commun existe entre les divers éléments dont nous avions reconnu la complexité. De quoi est formé ce lien ? C’est par cette question que nous sommes amenés à la notion de milieu ; notion dont l’apparence vague tient à l’abus qu’on en fait, mais qui, pour peu qu’on la creuse, se montre pleine d’enseignements.

C’est le climat, peut-on dire en un sens, qui décide de la prépondérance des formes de déblaiement ou de dénudation. Mais l’explication est trop sommaire, et ce mot ne rend pas un compte adéquat et complet des phénomènes. Nous voyons en effet que les formes elles-mêmes cherchent à s’organiser entre elles, à réaliser un certain équilibre. Ici à l’aide du vent, ailleurs à l’aide des eaux courantes, elles travaillent d’après un plan et pour une fin déterminée ; peu importe d’ailleurs qu’elles l’atteignent ou qu’elles soient contrecarrées en route. Les dunes et les sables s’alignent suivant une géométrie ; ils accomplissent une œuvre de nivellement. Chaque flèche s’allonge dans le sens de sa voisine, et tend à se raccorder avec celle qui lui fait face. Le ravin qui, né d’une rigole, écorche le flanc d’une montagne, soutire un faisceau de rigoles semblables ; et quand de cet ensemble il s’est formé un cours d’eau, celui-ci travaille, de concert avec ses frères, à adapter son profil suivant un niveau de base commun.

Si dans le monde des formes inanimées les traits se coordonnent, cette adaptation réciproque n’est pas moins sensible entre les êtres vivants, mais elle s’exerce différemment. Les plantes qui peuplent une contrée, les animaux auxquels ces plantes servent de nourriture, et jusqu’à un certain point même les groupes humains qui trouvent dans cet entourage, cet « environnement », suivant l’expression anglaise, le principe d’un genre de vie, sont composés d’éléments disparates. Il entre, avons-nous dit, dans les associations végétales les espèces les plus diverses de provenance et de forme. Mais au-dessus de ces différences une tonalité générale domine[1] ; les plantes s’organisent physiologiquement, elles revêtent pour s’accommoder aux influences ambiantes une livrée commune, d’après l’altitude, les intempéries, la sécheresse, la chaleur humide. Non seulement elles modifient suivant des procédés divers et parfois très inattendus leurs organes extérieurs, mais elles se combinent entre elles de façon

  1. Voir les planches contenues dans la publication de G. Karsten et H. Schenck. Vegetationsbilder.