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aux diverses parties de la surface. Elle les suit dans leurs combinaisons et leurs interférences. La Terre lui fournit pour cela un champ presque inépuisable d’observations et d’expériences. Elle a pour charge spéciale d’étudier les expressions changeantes que revêt suivant les lieux la physionomie de la Terre.

Remarquons, avant d’aller plus loin, que cette combinaison est la forme même sous laquelle les phénomènes s’offrent partout dans la nature. La géographie est sollicitée vers les réalités. « Dans la nature, a dit Buffon, la plupart des effets dépendent de plusieurs causes différemment combinées. » Avec plus de précision encore, le penseur éminent, très attentif aux choses géographiques, que fut Henri Poincaré, s’exprime ainsi dans un de ses derniers écrits : « L’état du monde, et même d’une très petite partie du monde, est quelque chose d’extrêmement complexe et qui dépend d’un très grand nombre d’éléments. » La justesse de ces vues nous frappe, quelle que soit la partie de la géographie que nous considérions. Le modelé du sol résulte du conflit entre les énergies que déploient pour l’attaque les agents météoriques et la force de résistance que leur opposent les roches ; mais ce conflit s’exerce sur un champ qui a déjà été remanié dans le cours des âges, et qui l’est encore incessamment suivant les modifications des niveaux de base et les oscillations de climat. Ce qu’on appelle le climat d’une contrée est une moyenne à laquelle contribuent la température, l’humidité, la luminosité, les vents ; mais l’évaluation de ces divers éléments ne donnerait qu’une idée fort incomplète, si l’on ne cherchait pas de quelle façon ils se combinent, non seulement entre eux, mais avec le relief, l’orientation, les formes du sol, la végétation et même les cultures. Voit-on, par exemple, le maximum saisonnier de chaleur coïncider avec le maximum d’humidité ? Tous les caractères d’un certain type de climat, celui du Sud de la Méditerranée, se dressent devant l’esprit. D’autres types, avec de multiples nuances, correspondent, au contraire, aux divers régimes de pluies d’été.

La diversité d’éléments à considérer n’est pas moindre dans le domaine des êtres vivants. La végétation d’une contrée est un ensemble composite, dans lequel on distingue des plantes de provenances diverses : les unes envahissantes, les autres réfugiées, d’autres qui sont des legs de climats antérieurs, d’autres qui ont suivi d’elles-mêmes les cultures de l’homme. Tout indique aussi, à mesure que l’on avance dans l’examen et l’analyse des faunes régionales, leur caractère composite. Des migrations, dont le sens et les dates nous échappent le plus souvent, ont brassé les tribus d’êtres vivants, y compris les hommes ; et c’est de leurs résidus que se sont formés, sur les diverses contrées où ils ont pu se concentrer, les occupants qu’on y rencontre. Tandis que les classifications linguistiques nous donnent