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ANNALES DE GÉOGRAPHIE

mier-né des deux plus vieux, il attribua la demeure de leur mère et le lot de terre d’alentour qui était le meilleur. Il l’établit en qualité de roi au-dessus de tous les autres qu’il fit archontes. La première couple de rois-jumeaux fut celle d’Atlas et Gadiros ; la seconde, d’Amphérès et Évémon ; la troisième, de Mnaséas et d’Autochthonos, etc.… « Toujours l’aîné était roi, et il transmettait sa royauté à l’aîné de ses enfants… Des dix rois, chacun, dans la partie qui lui revenait, exerçait le pouvoir sur les peuples de son État, faisait la plupart des lois, châtiait et mettait à mort à son gré ; mais l’autorité des rois les uns sur les autres et leurs rapports étaient réglés par les décrets écrits de Posidon… »

III

Quelle que soit la part de la fantaisie dans la description de Platon, il est quelques détails qui ne sont point imaginaires. S’il a donné à Gadiros sa ville aux multiples enceintes, c’est assurément que ses contemporains connaissaient déjà la lointaine Gadira et la signification de ce nom étranger : les Grecs de Sicile et de Marseille savaient que, en punique, Gadir signifiait « Enceinte ».

Cadix, qui a remplacé Gadès, est bâtie sur une plate-forme rocheuse de quelque 1500 m. de long (Est-Ouest) et 1200 m. de large (Nord-Sud). Cette plate-forme, aujourd’hui nivelée, était à l’origine un archipel d’îlots[1] entre lesquels la mer circulait ou stagnait. La ville a toujours occupé le plus grand de ces îlots ; d’autres subsistent à quelques mètres du rivage (Castillo de San Sebastian) ou plus au large (los Cochinos, las Puercas, etc.). L’île de Cadix est aujourd’hui reliée à la terre ferme par une bande de sables : sur 15 km. de long, cet isthme n’a, par endroits, que 200 m. de large entre la mer extérieure et le golfe boueux où le Guadalété pousse son multiple delta ; dix et vingt bras de ce fleuve découpent en nombreuses îles la terre ferme. Les 50 km. de rail, qui unissent Cadix à Jerez, franchissent, — dit-on, — neuf bras de fleuve ou de mer et traversent une demi-douzaine d’îles, les unes tout encerclées par le Guadalété, d’autres baignées par lui sur deux de leurs rives, les autres noyées dans les eaux boueuses de la baie.

Gadiros-Eumèlos habitait vraiment une série d’îles, sinon concentriques, du moins juxtaposées, que des ponts ou des levées devaient relier entre elles.

Dans son île principale, Gadiros-Eumèlos avait son temple de Posidon, « avec deux sources, l’une d’eau froide, l’autre d’eau chaude, — dit Platon, — toutes deux d’une abondance généreuse et merveil-

  1. « Gades fretum adtingit, eaque, angusto spatio et veluti flumine a continenti abscissa, qua terris propior est paene rectam ripam agit, qua Oceanum spectat, duobus promontoriis evecta in altum, medium littus abducit et fertin altero cornu ejusdem nominis urbem opulentam, in altero templum Aegyptii Herculis » Pomp. Mela, III, 47).