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envahis par les Malais, se franchit à partir de Ijob, en deux jours de marche à travers la forêt, par un col qui ne s’élève guère à plus de 500 mètres, laissant le Gounong-lnas au nord. À Sumpitan, on retrouve les sentiers malais, et au bout d’un jour, à Kota-Tampan, une route, ou au choix le Pérak, qui est navigable pour les pirogues.

Dans ces deux campements, j’ai pu voir environ 150 petits nègres des deux sexes. J’en ai mesuré et photographié une trentaine. Dans ces tribus, l’élément noir, sans être pur, est assez prédominant pour que tous les individus aient les cheveux crépus ; la couleur de la peau est chocolat. Le type, chez la plupart d’entre eux, rappelle franchement l’Andamanais, avec sa tête arrondie et sa face non prognathe (à noter que c’est le type grossier des Andaman qui est ici reproduit). Les mensurations confirment cette ressemblance. La taille moyenne est de 1m,49, supérieure de 4 centimètres seulement à la moyenne des Andamanais, et l’indice céphalique moyen s’élève à 79,5, inférieur de trois unités et demie à l’indice moyen des Andamanais, avec des oscillations individuelles qui vont de 74 à 84. Cet indice classe cette population dans la mésaticéphalie : nous sommes sortis de la sous-brachycéphalie des Négritos, mais nous sommes encore loin de la dolichocéphalie des Papous. D’ailleurs, cet allongement du crâne doit être attribué à l’introduction d’un autre élément, dont on n’avait jamais tenu compte dans la Péninsule, et que j’ai pu y caractériser, c’est l’Indonésien, blanc, dolichocéphale, qu’on retrouve ici comme aux Philippines. C’est-à-dire que le schéma de Quatrefages s’applique à la Péninsule malaise comme aux îles. Cet élément, en rendant compte de l’allongement relatif du crâne des Négritos métissés, explique l’erreur de Miklukho-Maklay et permet de concilier avec l’attribution à la race Négrito de l’élément noir de la Péninsule les observations de ce voyageur, qui sont par elles-mêmes exactes.

J’ai étudié en effet une série de tribus échelonnées jusqu’au sud de la presqu’île, et mes mensurations montrent également que l’indice céphalique s’abaisse progressivement en allant du sud au nord ; mais ce n’est pas l’élément noir qui est dolichocéphalique. Avant d’en donner la preuve, je vais indiquer brièvement quelle est l’apparence physique des tribus que j’ai visitées.

Dans la haute vallée du Batang-Padang, rivière qui se jette dans le Pérak au dernier grand coude de ce fleuve avant son embouchure, j’ai vu une tribu de Sakaïes qui sont d’un teint très clair, plus clair que les Malais, avec des cheveux souvent bouclés, mais longs et fins (Pl. IV). Le type le plus fréquent rappelle les Daïaks de Bornéo et les Battaks de Sumatra d’après toutes les photographies que j’ai vues de ceux-ci. Plus au sud, dans l’État de Sélangor, sur les bords de la rivière de Klang, j’ai vu deux petites tribus de Sakaïes qui, tout en ressemblant aux précédents, donnent l’impression d’être mélangés de Malais.