Page:Annales d’histoire économique et sociale - Tome 1 - 1929.djvu/52

Cette page a été validée par deux contributeurs.
46
ANNALES D’HISTOIRE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

a raison de remarquer que de pareils progrès, en si peu d’années, peuvent faire « l’étonnement du monde »[1].

Ils méritent aussi de donner pleinement confiance dans l’avenir de la production allemande. Elle est animée par un esprit de recherche scientifique qui paraît encore plus ardent qu’autrefois, au moins pour la tension de la volonté et la variété des initiatives. Les illusions elles-mêmes poussent à l’action, les rêves sont accompagnés d’effets. Une œuvre énergique est entreprise notamment pour tirer des matières premières existant à l’intérieur du pays d’autres matières premières qu’on ne pouvait jusqu’alors se procurer qu’à l’étranger. Par sa ténacité, elle suscite pour le pétrole de vives espérances et elle est couronnée de succès pour les produits azotés : dès 1926, la valeur de la fabrication, si récente, d’engrais azotés est estimée à un demi-milliard de marks. Ce mouvement national de libération économique enthousiasme les jeunes gens, qui entendent dans les universités et les écoles techniques déclarer que « le Reich se sauvera par la tête » et que, reprenant le désir suprême de Faust, il doit « tendre en avant dans un constant effort ».

Aussi l’importance de l’industrie apparaît-elle de plus en plus prédominante et l’aspect le plus remarquable de l’Allemagne d’après-guerre est évidemment son développement industriel, ce qu’on peut appeler sa surindustrialisation, qui pousse certains Allemands à être hantés par l’idée de devenir les « Américains de l’Europe ». Depuis 1925, l’ensemble de la production est nettement supérieur à ce qu’il était avant la guerre et, en 1928, on estime que l’appareil dépasse de 40 p. 100 la capacité de 1913[2]. D’après le recensement du 15 juin 1925, il a à son service 12 238 765 individus, soit 41 p. 100 des Allemands qui exercent une profession[3].

L’industrie allemande s’est vite remise des secousses fiévreuses que lui ont infligées une série d’épreuves : la défaite, la révolution, une inflation intolérable. Toujours plus puissante, elle travaille et crée, augmente inlassablement et groupe ses énergies productrices, développe le capital traditionnel que lui valent l’habitude de la discipline, un sens éminent de l’organisation et de l’adaptation aux circonstances, une information économique toujours au courant, enfin l’audace, une audace ingénieuse, que rien ne contente et qui, assurément, ne va pas sans risques tumultueux.

Maurice Baumont.
(Genève.)
  1. Die Bedeutung der Rationalisierung für das deutsche Wirtschaftsleben, Berlin, 1928, p. 66.
  2. Axel Schindler, Grundfragen der deutschen Handelspolitik, Berlin, 1928, p. 89.
  3. L’agriculture en comprenant 30,5 p. 100 et le commerce 16,5 p. 100. L’Institut pour l’étude du mouvement économique estime que, deux ans plus tard, le nombre des Allemands qui exercent une profession s’est accru de 2 à 3 p. 100 ; la production s’est élevée de 7 à 8 p. 100.