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ANNALES D’HISTOIRE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

tendance qu’elles indiquent vers une prospérité générale des affaires. Les progrès de l’essor industriel s’accentuent jusqu’à l’automne de 1927.

À partir de ce moment, l’Institut pour l’étude du mouvement économique (Institut für Konjunkturforschung), les services économiques des grandes banques signalent des menaces sérieuses qui surgissent à l’horizon : le Reich aborde une période difficile. Au printemps de 1928, l’industrie et le commerce se trouvent arrêtés dans leur marche ascendante. Veulent-ils seulement reprendre haleine ? Des symptômes nettement défavorables se dessinent ; une régression marquée se fait sentir dans presque toutes les branches de l’activité. La dépression est manifeste dans l’industrie textile, l’industrie du vêtement, l’industrie de la chaussure. Cette dernière est particulièrement atteinte par la concurrence tchèque. Dans la métallurgie, on note un ralentissement des commandes ; mais, comme l’industrie chimique, elle a réussi à compenser en partie les effets de l’accroissement des salaires par des mesures de rationalisation dont tire profit l’exportation[1].

Il est difficile de calculer avec précision le retentissement du fléchissement industriel sur l’économie générale de l’Allemagne. Elle ne semble pas évoluer vers une crise décisive et immédiatement périlleuse ; elle peut encore s’acheminer vers un relèvement progressif et lent. Mais, malgré la résistance tenace qu’opposent les forces de production, elle peut aussi s’approcher d’une nouvelle période de dépression, succédant à une période de prospérité.

Le malaise grandissant dépend surtout de l’exagération des prix de produits industriels, résultant elle-même de la hausse des salaires.

Les salaires, fixés au lendemain de l’inflation monétaire, étaient médiocres. De ce fait, l’industrie allemande se trouvait privilégiée par rapport à la plupart des entreprises étrangères ; un avantage considérable lui était assuré à cet égard. Des rajustements étaient inévitables. Dès le printemps de 1924, en même temps que le chômage diminue et que la stabilisation monétaire rend financièrement quelques forces aux organisations syndicales, la pression ouvrière fait augmenter les salaires. Ils s’élèvent lentement, quoique dans des proportions assez fortes, en 1924 et au début de 1925, puis marquent un temps d’arrêt. Les arbitres officiels, qui sont les maîtres des salaires, doivent alors constater souvent que l’industrie, aux prises avec de sérieuses difficultés, ne peut supporter de nouvelles charges.

La hausse reprend au début de 1927, elle devient plus rapide grâce à l’activité générale des affaires. Les premières majorations sont destinées à compenser la hausse progressive des loyers ; car, par un état de choses qui n’est pas propre à l’Allemagne, la stabilisation moné-

  1. L’Institut pour l’étude du mouvement économique estime que, à la fin de juillet 1928, l’exportation occupait encore 900 000 personnes de plus qu’un an auparavant.