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L’INSTRUCTION DES MARCHANDS AU MOYEN ÂGE

avaient fondées est non seulement tolérée, mais garantie par le comte. Pour en établir une, il suffira d’en obtenir licence du notaire Simon, c’est-à-dire d’un homme qui, mêlé à l’administration comtale, est capable de comprendre le genre d’instruction que doivent dispenser des écoles destinées aux laïques. Si les bourgeois ne possèdent plus l’entière liberté scolaire dont ils s’étaient emparés, du moins la faculté d’entretenir un enseignement urbain ne leur est-elle pas contestée.

Quelques années plus tard, ils arrivaient au but. En 1191, ils faisaient inscrire dans la charte extorquée par eux à la comtesse Mathilde, « que si quelqu’un de convenable et de capable veut ouvrir une école dans la ville de Gand, personne ne pourra l’en empêcher »[1]. La même année, le comte Baudouin IX renouvelait cette assurance[2]. Le régime qui dotait ainsi la bourgeoisie de la liberté scolaire la plus complète ne dura pourtant pas très longtemps. En 1235, une organisation assez différente lui était substituée par la comtesse Marguerite. Cette princesse déclare formellement que la maîtrise (magisterium) des écoles dépendant de Sainte-Pharaïlde lui appartient. En conséquence, le doyen et les chanoines lui présenteront chaque année, avant la fête de Pâques, une personne choisie par eux pour exercer la direction de ces écoles, qui sera tenue à perpétuité d’elle et de ses successeurs[3]. La surintendance de l’enseignement urbain repassait

    Philippus Flandriæ et Viromandiæ comes… monstravit quod olim quasi a primo ecclesiæ S. Pharaïldis fundamento, quæ est in Gandensi oppido sita et specialis est capella Flandriæ comitis, scolæ prædicti oppidi assignatæ fuerunt uni canonicorum, ut nullus in eodem oppido sine illius assensu cui a comite scolæ assignatæ fuerunt scolas regere et gubernare praesumeret. Postmodum autem infortunio miserabili, præfato oppido penitus igne consumpto, etiam dicta ecclesia in pulverem et in cinerem redacta, cum privilegia ejusdem ecclesiæ tam de scolis praelibatis quam de eleemosynis sibi collatis fuissent in combustione et cibus ignis, multitudo civium propter arridentem sibi divitiarum abundantiam et arces domorum (cum) turribus aequipollere videbantur, ultimum modum superbiens, domino suo rebellis, contumax et insolens facta est, ut non solum in regimine scolarum transferendo verum etiam in aliis plerisque jurisdictionem sibi et dominium comitis usurparet. Cum autem ad tempora prænominati hujus excellentis comitis… ventum esset,… ecclesiam S. Pharaïldis scolis atque aliis possessionibus dotavit et ditavit. Nos vero, devotionem ipsius attendentes,… tibi dilecte fili Symon, scolas ab eodem comite collatas confirmamus, statuentes et sub incominatione anathematis inhibentes, ne quis sine assensu tuo et licentia, in toto Gandensi oppido vel oppidi suburbio scolas regere praesumat. » La charte est adressée « dilecto filio Simoni, Gandensi notario ». Je dois ajouter que M. O. Oppermann, Die älteren Urkunden der Klosters Blandinium und die Anfänge der Stadt Gent, Utrecht, 1928, p. 478 et suiv., a rejeté comme un faux fabriqué au xiiie siècle, la charte de l’archevêque. Mais sa démonstration ne tient pas. Faute d’avoir compris la bulle d’Alexandre III, laquelle se borne à ordonner une enquête sur les prétentions de S. Pierre relativement aux écoles de Gand, il y voit la preuve que ces écoles relevaient de S. Pierre et non de S. Pharaïlde. En réalité, la charte de 1179 est de tous points authentique, et son contenu est corroboré par tout ce que nous savons de l’histoire de Gand, dont M. Oppermann n’a qu’une connaissance très défectueuse.

  1. « Si quis in Gandavo scolas regere voluerit, sciverit et potuerit, licet ei, nec aliquis poterit contradicere ». Warnkœnig-Gheldof, Histoire de la Flandre et de ses institutions, t. III, p. 229. La charte est attribuée généralement à l’année 1192. Elle est en réalité d’août-octobre 1191.
  2. Ibid., p. 232.
  3. Warnkœnig, Flandrische Staats- und Rechtsgeschichte, t. II, Urkunden, 1, p. 41. Cette organisation en remplaça une autre un peu différente de la même année. Voy. Warnkœnig-Gheldof, loc. cit., p. 268. Celle-ci avait pour but d’établir la transition entre les droits acquis du directeur des écoles et le régime nouveau de l’annalité des fonctions qu’il avait reçues.