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XXII


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Ainsi que ma douleur est au cœur de ma vie,
Ta douleur, bien-aimée, est au cœur de la mienne ;
Et, comme mon chagrin saigne au fond de moi-même,
Au fond de mon chagrin saigne encor ta pensée.

Quand ma peine paraît de souffrir assouvie,
Il naît en elle une autre angoisse plus lointaine,
Dont elle n’est qu’un faible écho, qu’un pâle emblème,
Comme elle est elle-même en ces vers retracée.

Mais cette angoisse est trop profonde pour les mots,
Elle gît au delà des plus profonds sanglots,
Dans les gouffres obscurs de mon être abîmée,

Et noyée en mon sang qui la roule en ses flots ;
Et la douleur de ma douleur, ô bien aimée,
Doit pour toujours en moi rester inexprimée.