Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 1, Hachette, 1890.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tions tions physiques et économiques de Fempire des Romanof, à considérer les exigences de la vie pour le vêtement, l’alimentation, le chauffage, la Russie paraît devoir le céder un jour en population aux États-Unis d’Amérique, et peut-être, dans deux ou trois siècles, au Brésil. Malgré l’étendue de ses domaines, elle n’est pas sûre de dépasser les deux cent cinquante millions d’âmes de l’Inde, et, à plus forte raison, le demi-milliard d’hommes de la Chine, dont les innombrables multitudes pourraient bien un jour refluer vers le nord, et disputer à la colonisation russe la Sibérie orientale ou le centre de l’Asie.

Quoi qu’il en soit de ces lointaines perspectives, la Russie a déjà 115 millions d’habitants, et, vers 1950, elle en aura 180 millions, sur un territoire contigu, ce qui est interdit à tout autre peuple européen, à moins que, avec le Drang nach Osten, les Allemands ne finissent par étendre leur domination, aux dépens des Slaves, sur la plus grande partie de l’ancienne Pologne, sur l’Autriche-Hongrie et peut-être sur la péninsule des Balkans.

En Europe comme en Asie, c’est surtout de la terre et de l’agriculture que le tsar doit attendre l’augmentation prochaine du nombre de ses sujets. Le travail des champs est loin cependant d’être leur unique ressource. En mainte contrée, dans la région centrale notamment, l’industrie contribue déjà à l’accroissement de la population comme de la richesse. La Russie est beaucoup mieux douée sous ce rapport qu’on ne l’imaginait jadis. L’industrie y sera tôt ou tard appelée à un grand essor, elle y fait déjà de rapides progrès ; s’il leur était jamais permis de tirer leur subsistance de l’étranger, le nombre de ses habitants pourrait, de ce chef, multiplier à l’infini.

Non seulement la Russie trouve au dedans de ses frontières la matière première de presque toutes les fabrications ; — les manufactures moscovites n’emploient guère que du coton du Turkestan ; — mais la nature lui a donné les deux grands instruments du travail moderne, le fer et